Plaidoyer pour les animaux by Matthieu Ricard

Plaidoyer pour les animaux by Matthieu Ricard

Auteur:Matthieu Ricard [Ricard, Matthieu]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Allary Éditions
Publié: 2014-08-28T16:00:00+00:00


On revient au spécisme

Le chauvinisme humain ne se contente pas de rappeler que l’existence humaine a une plus grande valeur que l’existence animale — qui pourrait raisonnablement en douter ? — mais à se dégager de tout devoir et de toute compassion envers les animaux. Pourtant, il suffirait d’inverser quelques instants les rôles pour comprendre l’incohérence de cette position. C’est ce que fit Henri-Joseph Dulaurens qui écrivait au XVIIIe siècle :

Que dirait-on cependant si un chien, devenu chirurgien, cassait la jambe à un homme pour apprendre à guérir celle d’un autre chien ? Que dirait-on si un chat arrachait l’œil à un enfant pour voir comment les fibres médullaires du nerf optique sont étendues sur la rétine ? Que dirait-on enfin si une biche, armée du scalpel, ouvrait le ventre à une jeune mariée, pour y découvrir le mystère de la génération, ou seulement pour satisfaire sa curiosité ? Ne crierait-on pas au meurtre ! À la cruauté31 !

Il nous faut également ici considérer un argument de Peter Singer, dont on retrouve l’origine chez Jeremy Bentham, démonstration qui a souvent été mal interprétée, violemment critiquée et montée en épingle par ceux qui dénigrent le mouvement de la libération animale. Singer fait ce raisonnement par l’absurde : si le moindre développement, chez les animaux, de certaines capacités humaines — l’intelligence, un projet de vie, les valeurs morales (ou l’absence d’autres capacités comme le génie philosophique et scientifique) — justifiait la prérogative de les utiliser à notre convenance, notamment pour l’expérimentation scientifique, qu’est-ce qui nous retient d’avoir recours à des humains en état végétatif profond et irréversible ? Ceux-ci sont en effet affligés d’une absence totale des capacités dont jouissent certains animaux. Certains grands singes ont un quotient intellectuel de 75, sachant que la moyenne chez les humains est de 100.

Il est évident que nous sommes horrifiés à l’idée d’instrumentaliser d’autres êtres humains. Fort heureusement, nous éprouvons envers eux suffisamment d’empathie et de compassion pour être concernés par leur sort, quand bien même ils sont incapables de manifester la moindre des facultés qui donnent à l’existence humaine sa qualité si particulière. Le fait que nous soyons naturellement portés à accorder notre sympathie à nos semblables a certainement une composante biologique et philosophique. Mais nous devons reconnaître qu’elle est partiale, subjective, et déformée par nos préjugés.

L’idée de ce raisonnement par l’absurde n’est pas d’animaliser les humains ou d’humaniser les animaux, ni de suggérer que l’on commence à utiliser des humains en état végétatif pour l’expérimentation scientifique et médicale dans le cas où cela permettrait d’importantes découvertes utiles à l’humanité, mais de cesser d’instrumentaliser les animaux à notre guise et sans merci. Par essence, il ne s’agit nullement d’étendre aux humains les sévices que l’on fait subir aux animaux, mais d’étendre aux animaux la compassion que l’on éprouve envers les humains.

Quelques lueurs d’espoir

Une nouvelle directive européenne de 2010 affirme : « Les animaux ont une valeur intrinsèque qui doit être respectée et […] qu’ils devraient donc toujours être traités comme des créatures sensibles. »



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